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Pente à l’Onade (Variations en Mariailles mineur).

« I’m in Las Vegas bitch ! » Dans le genre grimpette qui fait mal aux jarrets, celle qui conduit de la vallée de la Rotja au refuge de Mariailles ne fait pas dans la dentelle. Et la musique, (« I’m in Las Vegas bitch » Fatboy Slim remix donc) aide à faire passer la pilulle. C’est plutôt du tendu, sans répit sauf peut-être quelques mètres au col de Jou et une petite centaine au parking du Randé. Bref, c’est une boucle « no pain no gain » que nous avons empruntée dimanche matin pour aller vérifier une intuition de Marc. Celle là même qui était à notre programme lors de cette épique sortie de mauvaises décisions.

À Mariailles tu poses tes fesses et tu souffles en regardant le paysage.

À Mariailles tu poses tes fesses et tu souffles en regardant le paysage.

De bonne heure nous sommes partis, l’idée c’était, aussi, d’aller passer voir les coureurs à pied du championnat du Canigou, douce illusion ils vont bien trop vite, de bonne heure donc nous nous élançâmes depuis la vallée pour rejoindre le col de Jou, première étape de notre périple. Ça monte bien mais sans trop de difficultés, c’est après que ça se corse, jusqu’à Mariailles, avec des portions bien raides (17% de moyenne sur 800 m ça calme ta prétention). Il était prévu au départ que nous grimpions jusqu’à la Croix de Lipodère après le refuge, mais vu l’état moyen des troupes, nous avons pris la sage décision de filer à flanc pour aller quérir l’entrée du sentier que nous voulions vérifier. L’idée était très bonne en fait. Clairement, ce n’est pas un sentier roulé souvent… La trace fait 20 à 25 centimètres de large, les cintres de plus de 700 passent tout juste entre les arbres, mais à part ça, c’est de la balle. Du haut jusqu’en bas.

Un festival de pente !

L’entame est sérieuse, pentue, cabossée. Coup de bol, les orages des jours précédents nous offraient un grip terrible et on restait sans mal sur le vélo, à condition de pouvoir y monter. Cette première partie se descend lentement, il n’y a guère moyen de prendre de la vitesse, le pente est très forte, les épingles tordues, les virages fuyants. Après un petit replat bien agréable à rouler dans une trace propre dans l’herbe, l’affaire replonge dans la pente, il n’y a pas d’autre verbe que celui-ci. Un truc à attraper le tournis, les épingles s’enchaînent, beaucoup sont franchissables, quelques unes non qui obligent à poser le pied, et souffler un peu. À l’entrée dans la forêt, la trace se fait plus large, plus roulante, enfin, plus rapide, les épingles comportent souvent des relevés naturels qui permettent de soulager les disques, je me suis surpris à crier quelques fois dans ce dédale bien ordonné pour le plaisir de rouler.

Piège pour le dernier.

La pente est un peu moins forte dans cette section, mais on y goûte de nouveau de loin en loin, la trace se fait alors moins lisible, plus rebelle, il faut deviner, ne pas se louper entre les arbres, s’interroger en se demandant si on n’a pas manqué un truc, savoir distinguer la rigole de la trace… Au final, on termine dans la rivière en fond de vallée, le temps d’ourdir un complot pour le dernier qui arrivera en bas de l’épreuve et verra fondre sur lui, au moment où il traverse le filet d’eau, une pluie de cailloux dans la vasque toute proche ! Donc voilà, comme d’hab, on a validé un parcours, et déjà les yeux traînent sur la carte dans les environs pour continuer d’explorer ce pan de montagne riche en promesses.

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Putain de bordel de merde

Il y a des jours ainsi lors desquels tu pars en te disant que ça valait le coup d’attendre. Puis en fait, c’est la débandade. L’attente n’est pas récompensée, l’affaire tourne à la farce. Ce samedi fut de cette aune funeste, un samedi de merde. Le programme était alléchant, la jonction de deux belles traces de vélo de montagne avec au milieu un truc que je connaissais pas. 40 bornes tracées à l’arrache, autour de 1200 m de positif et plus de 2000 à perdre.

Chat et souris.

Chat et souris.

Il avait plu la veille au soir, la poussière allait être collée et on pouvait espérer avoir un grip de fou dans les parties les plus pentues. Déjà en arrivant, les nuages, oracles d’eau vaporisée, nous prévenaient qu’ils ne nous lâcheraient pas de sitôt. Ils s’engouffraient dans les vallées avec la gourmandise de ceux qui ont la dalle après trois semaines d’absence pour rebondir dans les combes et rigoler de notre insouciance bravache.

Souris et chats

Souris et chats

Nous avons englouti le dénivelé initial comme sans trop nous en rendre compte, la piste était belle pour nous mener à plus de 2200 mètres, là où le regard se perd à chercher l’horizon. Mais les nuages cannibales de rêves de fortunes nous avaient bouffé l’horizon, où plutôt nous l’avaient rendu malheureusement palpable, l’avaient amené au bout de nos doigts.

Toucher l'horizon du bout du doigt.

Toucher l’horizon du bout du doigt.

À la collade de Roques Blanques, nous avons causé saucisson et chimie dans la purée de pois dont seule la densité variait de loin en loin, comme une mélodie de Fauré, c’était donc affaire de cuisine. L’idée était de trouver un passage un peu plus roulant que le sentier balisé pour traverser les Esquerdes, une crête parsemée de triangles de pierres. Ça semble passer sur Google earth, mais dans la réalité, quand tu n’y vois pas à 50 mètres, c’est difficile de se faire une idée de la direction à prendre et à suivre.

Casse-croûte saucissonesque.

Casse-croûte saucissonesque.

Vaillants nous partîmes quand même par le flanc est de la crête en nous disant que l’aventure allait nous sourire. Elle a presque sourit, jusqu’à un une série de plats parsemés de pierres concaves nous obligeant à de convexes trajectoires. Ça chauffe les cuisses velu par endroit quand la pente se fait un peu raide, mais nous étions toujours plongés dans le brouillard pas franc des nuages, jusqu’à ce banc de chevaux au milieu de la nuée réchauffé par un rayon de soleil. Pour la suite, il nous fallait choisir. Revenus sur le flanc ouest de la crête, un large pierrier barrait l’horizon de nos roues.

Tu murmures à l'oreille ?

Tu murmures à l’oreille ?

Drôle d'ambiance à 2300 m.

Drôle d’ambiance à 2300 m.

Nous décidions donc de tracer en free ride dans la pente pour retrouver le sentier et finalement nous trouver au pied du mauvais passage que je cherchais à éviter. Il faudra retourner voir, je suis certain que ça passe de l’autre côté. Un bon moment de portage plus tard, nous entamions sur la selle la fin de la traversée des Esquerdes pour rejoindre la mort de l’Escoula, au prix d’un nouveau portage un peu raide juste sous la falaise. C’est là qu’il faut sortir les watts du sac pour rester sur le vélo le plus longtemps possible, savoir sortir de la trace des marcheurs à la poussière fine pour aller s’épuiser dans l’herbe rase, terrain de jeu des isards qui galopaient au loin un peu plus bas par dizaines sous les sifflements prudents de marmottes.

Sorti de nulle part.

Sorti de nulle part.

Et là, la cata. Campé sur le vélo, arc-bouté sur les cuisses pour rouler encore quelques mètres et passer ces putains de pierres, j’ai senti mon cul se dérober, sans comprendre, une glissade, la stupéfaction a duré une seconde, le temps que je réalise, la selle ne tenait plus sur sa tige. Les deux vis du chariot avait cassé net en même temps. J’étais dégouté. Pour de vrai.

Pas suffisant.

Pas suffisant.

Nous avons bien tenté de remettre la selle en place pour que je puisse rouler encore un peu, au moins pour protéger mon fondement des velléités pénétratrices de la tige de selle ainsi dégarnie, sans succès. Le beau rafistolage n’a pas tenu trois minutes. Et c’est là que l’expression « se retrouver au milieu du gué prend tout son sens ».

Dernier portage.

Dernier portage.

J’ai donc fait une dizaine de bornes sans selles et sans plaisir, alternant marche et ride, posant le pied dans le cassant qu’habituellement je franchis, écourté la sortie de moitié… Aujourd’hui j’ai les cuisses mâchées, les mollets endoloris et le moral en petites pièces. Fuck.

Je retournerai, encore, pour trouver le passage.

Je retournerai, encore, pour trouver le passage.

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Au hameau d’En en joëlette

C’est avec Raphaël que nous sommes partis ce matin, mes garçons et moi, Mirabelle, l’accompagnateur de Raphaël, Romain, Aurélien… Pour faire un petit tour de piste du côté de Nyer. J’étais déjà passé dans ce village presque perdu en décembre dernier, j’avais donc une idée du paysage et il n’y avait rien de mieux à faire un quatorze juillet, bigre.

Avant toute chose, il faut monter la Joëlette.

Avant toute chose, il faut monter la Joëlette.

Puis transférer Raphaël de son fauteuil vers la Joëlette.

Puis transférer Raphaël de son fauteuil vers la Joëlette.

Sur le coup de 9 h 15, nous nous sommes arrêté au croisement de deux pistes au dessus du village, en direction du hameau d’En. Le temps de monter la Joëlette, d’y installer Raphaël et nous voilà, caminando sur cette piste confortable mais point trop rude, bavardant tranquillement, écoutant les explications d’Aurélien sur le paysage, les alentours…

Et la marche trouve son rythme.

Et la marche trouve son rythme.

Aurélien nous fait découvrir la signature olfactive du pin Douglas.

Aurélien nous fait découvrir la signature olfactive du pin Douglas.

L’occasion pour Raphaël, venu de Perpignan, et nous d’en apprendre pas mal, sur les pins Douglas et leur odeur d’agrume, de citron presque lorsqu’on froisse les aiguilles, la différence entre les sauterelles et les criquets, c’est une affaire d’antennes et plus spécialement de longueur d’icelles, la durée de vie des papillons, de quelques jours à quelques mois, de la carence mortelle en sel minéraux qui les affecte, de l’incurie des classificateurs français de la vie sauvage qui ont créé deux familles, papillons de jour et papillons de nuit alors que certains papillons de nuit sont diurnes…

Pause au hameau d'En, vue sur la vallée de la Têt en prime et Olette, tout en bas.

Pause au hameau d’En, vue sur la vallée de la Têt en prime et Olette, tout en bas.

Cette petite randonnée ne présente pas de difficulté technique, même quand la pente s'accentue comme ici dans le hameau.

Cette petite randonnée ne présente pas de difficulté technique, même quand la pente s’accentue comme ici dans le hameau.

Bref. L’occasion aussi d’apprendre que le hameau d’En fut, une fois déserté par ses habitants, conquis par une communauté de convertis à l’Islam (je vais chercher à en savoir plus) qui furent ensuite délogés de là par les forces de l’ordre au bout de quelques années. Et les étoiles dans les yeux de Raphaël, au milieu des ruines, répétant avec envie, et raison « ça doit être le pied de vivre ici ! »

Après le hameau s'amorce le chemin du retour sous l'œil bienveillant du Canigou.

Après le hameau s’amorce le chemin du retour sous l’œil bienveillant du Canigou.

Sinon, j’ai tiré la joëlette aujourd’hui pour permettre à Raphaël d’arriver jusque là. On passe les sangles aux épaules, c’est confortable. C’est juste un peu déstabilisant au début puisqu’il faut seulement tirer et guider, ne pas se préoccuper de l’équilibre qui est assuré là par Mirabelle, l’équipière située à l’arrière dans le brancard. Donc il faut souquer ferme mais ce n’est pas si difficile. Et regarder loin devant pour choisir la trajectoire la plus confortable, éviter les trous, les glissades sur la terre battue plein de poussière… Ce n’est pas si difficile, seulement physique en fait, pour le reste, pratiquer le VTT aide à lire le sol et conduire l’attelage ! On recommencera !

Papillon peinard.

Papillon peinard.

Aurélien détaille les us et coutumes des papillons en répondant aux questions des uns et des autres.

Aurélien détaille les us et coutumes des papillons en répondant aux questions des uns et des autres.

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Les doigts dans le pot de miel.

Des fois je me goure. Mais je me goure velu. Voilà, c’est ce qui s’est passé dimanche. J’avais prévu un ride costaud mais beau, de ceux qui te font avancer parce que c’est chouette et que ce que tu vois te donne envie d’en avoir plus, d’en voir plus. Nous étions un poignée de joyeux lurons au départ au col de Mantet. Quelques légitimes interrogations pointant, je décidais de changer le programme, au dernier moment. Au lieu du portage et des Esquerdes, il serait question de la piste vers le col. Une broutille, ça monte toujours bien par là.

Un peu de mécanique. Normal.

Un peu de mécanique. Normal.

La montée passe crème depuis le col.

La montée passe crème depuis le col.

Au col, nickel. De la brume, on ne voyait rien. De là, après avoir jeté un coup d’œil ému aux Esquerdes à droite, nous sommes grimpés jusqu’au Pla Guillem. Ce nom, ce truc, qui me faisait rêver depuis quelques années. Et franchement, j’ai eu raison de rêver. C’est beau. Immense et réduit à la fois, c’est de la haute montagne, tu as l’impression de pouvoir toucher les falaises quand elles sont à trois bornes.

Open space pour Myriam et Chloé.

Open space pour Myriam et Chloé.

Miguel s'énivre.

Miguel s’énivre.

Bref, j’avais des merdes avec mon tubeless. Déjà, de bon, matin, il faisait déjà 25°, la canicule toussa, j’ai bataillé 25 minutes pour le faire claquer et faire que cette putain de valve arrête de perdre. Mais là, premiers mètres de descente dans la caillasse sur une piste somme toute tranquille, -2%, et pschitt. Tentative avec Miguel de remettre la valve, peine perdue, chambre glissée dans le caoutchou plein de latex, ça sera sympa demain quand je vais mettre les mains dedans. Bref, après le refuge on entrait dans l’inconnu, je ne connaissais pas ce bout là.

Taupe efface les arbres à donf'.

Taupe efface les arbres à donf’.

Ce petit bout de sentier est très joueur avec ses épingles.

Ce petit bout de sentier est très joueur avec ses épingles.

Le temps de spotter les cairns pour retrouver la trace et nous voilà dans un merdier impensable, inroulable, sauf à ne pas payer les dérailleurs et les roues ou à être doté d’une technique de trialiste pas pressé. Donc, le single du refuge jusqu’à la Croix de Lipodère (GR83) vous oubliez c’est pourri ! (Prenez la piste à droite du pic, ça ira mieux). À la croix, la descente se fait mignonne, je l’avais déjà empruntée en début de saison avec Marc, ça roule à flanc, c’est sauvage, ça gratte un peu les mollets par endroit, on n’y voit pas bien la trace, puis ça plonge dans la forêt et là c’est grand bonheur, mais nous n’avions plus d’eau. L’heure était grave, les gorges sèches. Il fallait faire des choix. Étant le seul à connaître et le coin et la trace, c’était pour ma pomme.

euh

La problématique était simple. Il nous fallait de l’eau, mais l’eau était à deux kilomètres au bout d’une jolie piste au refuge de Mariailles. Devant nous s’ouvrait une belle descente qui nous ferait perdre 250 m de déniv par rapport à l’eau. À gauche se trouvait la descente que je ne connaissais, et encore pour partie seulement, que par ouïe dire. C’était celle qui devait nous ramener illico vers Py. Donc, nous sommes allés chercher de l’eau, puis j’ai décidé de revenir sur nos pas pour prendre ce joli bout gourmand dans la forêt. En me disant, vu les 250 m de D+ qu’il y avait à reprendre, l’heure qu’il était, l’âge du capitaine et tout le toutim, qu’on allait transiger pour le plus rapide. Je croyais.

POD. Un rayon de soleil, une belle traj' de Myriam et zou, une photo.

POD. Un rayon de soleil, une belle traj’ de Myriam et zou, une photo.

Miguel flirte avec l'extérieur punitif.

Miguel flirte avec l’extérieur punitif.

Le plus rapide en l’espèce c’était de, horreur, prendre la piste pour un bon bout descendant. Au parking, nous avons donc dévalé la piste à tombereau ouvert. Mais je ne souhaitais plus nous lancer dans une explo inédite, sans savoir ce qui nous attendait. Une fois la piste dévalée jusqu’au col de Jou, j’avais imaginé prendre le GR10 pour rallier Py, où nous attendait la voiture de Taupe. J’avais avec Marc déjà pris ce sentier, mais dans l’autre sens. L’avais alors trouvé dur, on avait porté longtemps, mais dans mon souvenir, dans l’autre sens, c’était roulable. Mais en fait, pas vraiment. Et là, c’était vraiment galère. J’ai avancé comme un taré pour voir s’il était possible de faire quelque chose, mais non, il fallait endurer ce sentier mal pavé de mauvaises intentions, qui te te laissait rouler que 20 mètres avant de te menacer de t’envoyer bouler 30 mètres plus bas… Je n’ai pas osé partir dans l’inconnu, infliger aux autres ce que je suis capable moi-même d’endurer parfois comme conséquence de mes idées stupides en la matière ! Parce qu’au final, pourrie pour pourrie, on avait la choix des fins.

Une cassure ? où ça une cassure ?

Une cassure ? où ça une cassure ?

Bref, c’était une mauvaise idée. Il restera le bonheur de la crêtes, les esquerdes, le Pla Guillem, ce sentiment infini de liberté, la montagne qu’on peut toucher du bout des rêves et ce petit single sauvage se glissant fripon dans la forêt comme le courant d’air par la fenêtre au petit matin sur la peau des corps éreintés par la chaleur de ces jours ci. Mais cette grande balade reste à affiner, il faudra aller voir ce fichu sentier que nous n’avons pas pu goûter parce que si ça passe, c’est beau ! Et comme nous avons eu bien chaud, l’envie de regarder, et d’écouter ça : « Water walk » de John Cage. « Because I walk while I perform. »

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Partage single avec Joëlette, let’s ride.

Le hasard fait bien les choses. Commis d’office pour une rando Joëlette, j’ai pu découvrir hier samedi avec mes garçons qu’on pouvait partager les sentiers avec d’autres, ce que nous savions déjà, mais plus précisément avec ceux qu’on ne penserait jamais voir dans de tels endroits. À Py, nous avons rejoint Mirabelle de l’association Nataph, sa joëlette, les hommes de la réserve naturelle de Py, la conteuse Estelle Cantala et Hélène. Hélène qui vit à la fois dans notre monde et dans un autre dont je ne saisis pas l’étendue.

En d'autres lieux on dirait qu'il faut souquer ferme !

En d’autres lieux on dirait qu’il faut souquer ferme !

Pause paysage.

Pause paysage.

À 38 ans, c’était sa première sortie en montagne, accompagnée de sa mère. Une fois bien assise dans la Joëlette nous avons dévalé la pente jusqu’à la rivière. Le rôle qui nous avait été assigné à Louis te moi était la « parade ». C’est à dire rester sur les côtés de l’engin, aider à passer les marches, les cailloux, mettre de la douceur si possible dans les franchissements d’obstacle pour aider le travail du gros amorto situé sous le siège. Parfois, le sentier n’est pas assez large pour passer de front alors il faut ruser, passer devant, lire le terrain, anticiper les éventuels besoins. On dirait du VTT.

En fait, ça passe partout la Joëlette.

En fait, ça passe partout la Joëlette.

Une roue, un amorto, des biscotos.

Une roue, un amorto, des biscotos.

Regarde loin la trace devant toi pour mieux t’en sortir. Bref, il faisait bien chaud même à l’ombre géréneuse de la forêt. Quand il montait ce fichu sentier ne faisait pas semblant et était très à son aise quand il s’agissait de nous glisser des pierres en travers de la trajectoire. Mais bon. Nous en avons aussi connu de bien plus tordus. Au long de haltes contées, la Joëlette était posée sur ses béquilles, puis celles ci démontées et nous repartions. Je ne sais pas pourquoi, mais le verbe « caminar » s’impose pour ça, « faire le chemin », nous avons fait le chemin pour Hélène. Nous n’avions que ses mains pour essayer de sentir comment elle vivait les choses, ses yeux étaient cachés derrière ses lunettes de soleil.

Pause conte, à l'ombre sur le sentier.

Pause conte, à l’ombre sur le sentier.

Épingle !

Épingle !

Des mains que ne trahissaient pas de signes particuliers d’angoisses ou de frousse. Une sensation confirmée par sa mère, un peu inquiète au début des réactions qu’elle aurait pu avoir. Près de trois heures, c’est le temps de la ballade d’hier, sur un sentier très agréable le long de la Rotja. Trois heures qui m’ont permis de comprendre qu’on pouvait partager les sentiers aussi autrement qu’en en faisant chronique comme je le fais ici. Trois heures, quelques litres de sueur. C’était la première fois qu’Hélène allait ainsi, « caminando » sur les chemins de montagne. J’y retournerai.

Les mains d'Hélène.

Les mains d’Hélène.

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Un petit Madres au tour (2e partie)

J’ai un peu rapidement expédié dans la première partie (lire ici) le ride sommital, appelons ça ainsi. Le début nécessite un petit poil de désescalade, mais rien de bien méchant. Ensuite, on porte encore un peu, ou on pousse c’est selon , pour arriver dans la première partie franchement descendante. Là faut pas s’emballer Marcel, mais bien prendre à droite  pour viser le refuge, sur l’autre flanc, là bas.

Passée la première partie le long de la crête, la trace devient roulante.

Passée la première partie le long de la crête, la trace devient roulante.

Nous n'aurons pas croisé grand monde par là, une petite dizaine de randonneurs au plus.

Nous n’aurons pas croisé grand monde par là, une petite dizaine de randonneurs au plus.

Au milieu, non, pas de rivière, mais un bon challenge pour les gars qui ont la couenne, une remontée au milieu des caillasses. Après le refuge (faire de l’eau à la source juste avant), ça continue sur une trace mal pavée pendant un moment et ça s’améliore. Quand tu prends à gauche vers le lac de Nohèdes, c’est beau, au milieu des rhododendrons encore, c’est pentu, la trace n’est pas super aisée et l’herbe sèche très glissante.

On a fait au moins 48 pauses photo…

On a fait au moins 48 pauses photo…

C'est pas si pire.

C’est pas si pire.

Au lac, nous avons croisé trois autres gars en train de casse-croûter, des connaissances, et fait un peu de cryothérapie. C’est là aussi que Vincent, l’un des deux crosseurs du jour, a planté le deuxième dicton du jour : « Manger c’est tricher. » Le premier dicton avait été prononcé au sommet donc balayé par le vent : « Qui pisse contre le vent se nettoie les dents. » Inutile de dire qu’on a attendu d’être descendu pour se soulager. Donc après le lac, Atha a perdu une des vis de l’étrier de frein arrière, tranquille quand tu as devant toi la bagatelle d’un 1400 négatif d’un bloc, ça s’est bricolé avec fortune, pour info, c’est du  6 5 mm, la vis, je vais en chercher une pour ajouter à la trousse de secours du vélo. La première partie du sentier est très pourrie pour rejoindre le canal ça roule pas beaucoup, même pour les meilleurs techniciens.

La nature a des ressorts inouïs

La nature a des ressorts inouïs

Plein gaz vers le Lac de Nohèdes.

Plein gaz vers le Lac de Nohèdes.

Après, c’est du bonheur jusqu’au col du Portus. Une trace vive tout en balcon sans être aérienne; ça pédale, ça consomme du jus, mais franchement, la vue sur le réservoir et le reste vaut la peine. Là au col, Franck a voulu faire le malin, que dis-je, le gourmand, et nous a mené sur une piste sans issue à bon rythme pendant un moment. On aurait dit la Cape Epic dans les pins. Finalement après un demi-tour que j’avais prophétisé (nanana), nous avons fini par reprendre le chemin classique pour atteindre le refuge de la Moline.

Cryothérapie.

Cryothérapie.

Salut les gars !

Salut les gars !

Et c’était tant mieux. Il y avait un moment que je n’avais plus d’eau, je n’étais pas le seul à être à sec et j’avais drôlement soif. Au point qu’avec la chaleur augmentant à mesure que nous perdions de l’altitude ma bouche n’en finissait plus de sécher, même dans les descentes, mais quand il n’y avait pas besoin de pédaler. Las, le robinet attendu n’était pas là au refuge. Heureusement, le gamin qui gardait un fort troupeau de vaches dans la clairière nous a conduit jusqu’à la cabane de son père, deux lacets au dessus. Nous avons pu faire le plein, tailler une bavette et apprendre que si le robinet n’était plus remplacé, c’était à cause du vandalisme. Bref, c’est là que j’ai crevé aussi, c’est aussi là que Marc Colom a triché, et c’est là que nous nous sommes élancés dans le Cami Ramader.

Faut envoyer du gros steak pour atteindre le canal, mais des fois ça passe pas quand même dans cette trace défoncée.

Faut envoyer du gros steak pour atteindre le canal, mais des fois ça passe pas quand même dans cette trace défoncée.

Le canal au dessus du réservoir. Juste magique.

Le canal au dessus du réservoir. Juste magique.

Assurément. Des Cami ramader dans les Pyrénées-Orientales, il en existe des dizaines puisque ce sont les chemins qu’empruntaient les troupeaux pour aller aux estives. Ils ont été patiemment construits et entretenus pour nous offrir aujourd’hui des terrains de jeu formidables. Pour celui ci, si l’on vous parle de Cami Ramader dans le département à propos de vélo c’est très probablement de celui là dont il est question, celui ci donc commence par une petite balade en forêt, le sol est souple, sans piège, il y a parfois de la pente. Puis, à mesure que le sentier perd de l’altitude, il se mouille par endroit, s’encaisse dans la vallée, la chaleur s’y montre alors pressante, la trace fait des tours et des détours dans les gorges. Il faut savoir freiner de temps en temps pour se rendre compte des alentours. Le chemin traverse plusieurs fois la rivière et des pierriers sonores. Les grandes pierres plates sonnent comme le feraient des xylophones sous les pneus et le son rebondit contre les parois.

N'en voyant que le cul, nosu avons pris cette brebis noire pour un sanglier !!

N’en voyant que le cul, nosu avons pris cette brebis noire pour un sanglier !!

Parfois en sous-bois, parfois en plein cagnard, cette descente est exigeante. Il faut de la vitesse pour passer les pierriers et les pierres aiment parfois bouger sous les roues, voire croquer un pneu ici ou là. N’est-ce pas Franck et Vincent ? Bref, de crevaisons en crevaisons nous avons fini par sortir de ce long exercice fatigant. Un bout de route, et voilà déjà le dernier morceau de single, une trace en légère descente vers Olette, seulement ponctuée de deux trois grosses caillasses à l’arrivée, juste avant le passage sous une arche totalement inattendue à l’orée de la ville.

Bricolage de fortune.

Bricolage de fortune.

La fatigue et la chaleur aidant, il y a moins de photos de la fin, mais nous retournerons au Cami Ramader, promis.

La fatigue et la chaleur aidant, il y a moins de photos de la fin, mais nous retournerons au Cami Ramader, promis.

Un dernier coup pour faire couiner les disques et les vélos sont garés à la terrasse du bistrot du village à 660 mètres d’altitude. Devant ta mousse, tu étires les cannes tu regardes les bulles s’amuser, tu fermes les yeux avec l’envie soudaine d’écouter ça.

Mine de rien, il y a quatre heures de cela, nous étions à plus de 2400 m. Combien de mondes étranges avons nous traversés pour arriver là ? Combien de mondes ? Combien de rêves ? Chacun de nous trouve dans ces sorties ses raisons propres, nous n’en parlons pas forcément, le cycliste a sa pudeur, chacun de nous poursuit ses propres ambitions au cours de ces longues ascensions et de ces interminables descentes. C’est un dialogue avec soi-même que nous partageons entre amis, il n’est jamais plus agréable d’être seul que lorsqu’on est bien accompagné. Combien de mondes avons-nous donc traversés ? Combien de rêves ? Probablement autant que les souvenirs que nous allons pouvoir maintenant choyer avant de reprendre notre jeu de légo. La gourmandise est bien un vilain défaut. Qui vient dimanche ? 

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Le papier de Franck sur son blog 2 roues dans les cailloux sur cette sortie mémorable

Plus de photos sur la page yannk sur facebook (vous pouvez likez en passant !)

Et puisque vous êtes nombreux à le réclamer, la trace.

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Un petit tour au Madres (1ère partie)

C’est une idée de Franck. Mais qui vaut pour tout ce que nous entreprenons en la matière. Rêver en jouant au grand légo des traces, au grand meccano du plaisir à deux roues. Assembler des bouts de traces pour faire des grandes virées. Nous nous étions déjà cassés les dents sur cette belle idée l’an passé, faute au mauvais temps de juillet. Cette fois, nous avons pris toutes les précautions en partant presque avant l’aube, à l’heure où s’habille d’or la montagne (pardon Victor). Bref nous étions 9 éparpillés à nous retrouver au col de Creu de bon matin.

Réveil du Canigou

Réveil du Canigou

À la poursuite du C15

À la poursuite du C15

Le soleil brillait sur les Pyrénées, il ne faisait ni froid ni trop chaud, la forêt nous tendait les bras avec générosité. Un premier single nous envoyait dans le bon pour l’échauffement et même pour certains carrément pa terre. Nous devions descendre un peu pour attraper une piste avec vue sur la Cerdagne et parvenir au col de Sansa, sans métamorphose.

Pousse-pousse

Pousse-pousse

De là, les choses sérieuses pouvaient commencer avec un brusque infléchissement de la pente. Les énervés du groupe prirent vite les devants, sans égard aucun pour les plus anciens qui roulent avec des moteurs diesel. Qu’importe. La piste était belle, nous avancions bon train, devisant gaiement, c’était une gai parade. Puis après quelques ennuis mécaniques pour moi, un bout un poil plus raide (euphémisme) nous étions au pied du chantier, sans trop nous en rendre compte.

Dru ! Mais beau.

Dru ! Mais beau.

Un single discret partant dré dans le pentu mais dont la rudesse était masquée par l’appétit de la forêt. Et ça montait bien dru jusqu’au débouché à l’air libre. Là, la pente se faisait moins coriace, autorisant les plus vaillants à remonter en selle. C’était beau, partout, nous prenions sans arrêt des photos, comme si nous étions sûr d’être déçus par la suite et qu’il fallait emmagasiner moultes images. Idiots nous étions. Et nous montions, effacions tranquillement (pour moi) les courbes de niveau de la carte. Il n’y avait pas bien long du départau sommet du Madres, plus ou moins 700 mètres de dénivelé, mais quand même, y’a un peu moins d’oxygène là haut, et je le sentais bien. J’étais plutôt bien, pas de douleurs dans les jambes, pas d’essouflement, mais une espèce d’impossibilité de tenir les watts plus de 5 minutes.

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Single at its best

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Le dernier coup de cul vers le sommet

Alors je poussais. Une première crête nous donnait à voir l’étendue du spectacle nous récompensant déjà de nos efforts. Nous apercevions presque le sommet du Madres, là bas. Ensuite s’ouvrait un joli single technique, presque à flanc, un rêve tracé dans l’herbe pour poser nos roues. Avant le dernier portage que l’on suivait en effaçant cette fois les piquets ornés de peinture plantés dans l’herbe. La meilleure façon de marcher, c’est de mettre un pied devant l’autre et recommencer. Et ne pas penser à la marche. Le vélo bien calé sur mon sac, tenu d’une seule main, j’avançais sans y prêter attention, laissant mon esprit divaguer, cherchant à savoir comment, moi le gars de la plaine, je pouvais avoir eu cette envie de gravir quelques montagnes. Et me revoyait gamin, grimpant dans une vieille carrière dans laquelle nous n’avions pas le droit de nous rendre, me revoyant plus tard, adolescent, pratiquer parfois l’escalade et partir à la suite de mes parents en randonnée en montagne. De fil en aiguille. Voilà, c’est ça peut-être que je regrette, n’avoir pas pu rendre ceci à mon père, pas eu ni le temps ni l’opportunité, mais c’est comme si je cherchais encore un moyen de le rencontrer finalement, c’est peut-êter ça que je regrette, n’avoir pu le conduire là, où j’étais à ce moment là, marchant vers le sommet rond du Madres, toucher au but, il aurait adoré.

Sommet

Sommet

Sommet

Sommet

Et retrouver les copains tout à la fois frigorifiés et heureux, comptant les isards et les marmottes, gravant dans leur mémoire ce joli bout de panorama. La suite fut finalement plus rude, mais tout aussi sympa. Un petit passage en crête, encore un peu de portage, un peu de freeride, une partie de dominos sur des dalles et des caillasses en veux tu en voilà, ça bouffe des dizaines de watts au mètre linéaire, encore des photos, encore du bonheur jusqu’au refuge juste sous la Perdrix.

Feu, début de la descente.

Feu, début de la descente.

Dru, mais dans l'autre sens.

Dru, mais dans l’autre sens.

Crête toute prête.

Crête toute prête.

La suite.

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La voie est toute Tracy

Autant les enduro world series sont ouvertes chez les hommes, et particulièrement cette année avec les blessures qui écartent les prétendants du titre final, autant chez les filles, on cherche la surprise. Là encore, je vous propose de plonger avec moi dans les statistiques des deux dernières saisons (2014 et 2015, je compilerai les stats 2013 plus tard) des EWS. Un graphique résume de façon lapidaire le suspens insoutenable auxquels les fans sont soumis. Celui du nombre de spéciales gagnées par les unes et les autres (saison 2014 et 2015).

Pas beaucoup de miettes ces deux dernières saisons (2014 et 2015)

Pas beaucoup de miettes ces deux dernières saisons (2014 et 2015)

À elle seule, Tracy Moseley empoche la moitié des spéciales courues, Anne-Caroline Chausson s’occupant des trois quarts de ce qui reste… Les miettes sont donc en portion congrues, portions congrues qui n’échappent pas à deux pilotes, Cécile Ravanel et Anneke Beerten. Dans les classements, la domination est encore plus parlante. Voyons par exemple l’évolution de la position de Tracy Moseley, actuelle leader, depuis l’ouverture des Enduro World Series.

Tracy Moseley n'est jamais descendue du podium depuis la création des Enduro World Series.

Tracy Moseley n’est jamais descendue du podium depuis la création des Enduro World Series.

Seule à pouvoir contester l’appétit de Tracy Moseley, Anne-Caroline Chausson fait preuve de tout autant de régularité.
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Dans ces conditions, difficile de se faire une place au soleil. On pourrait donc croire qu’une bagarre plus ouverte puisse se jouer pour les accessits et la troisième place sur le podium. Mais non, là encore, les positions des unes et des autres sont assez figées et tout se joue entre Cécile Ravanel et Anneke Beerten comme il était possible de l’entrevoir dans le graphique sur les victoires en spéciales ci-dessus.

Hormis sa victoire à Whistler l'an passé, Cécile Ravanel a toujours du se contenter des accessits.

Hormis sa victoire à Whistler l’an passé, Cécile Ravanel a toujours du se contenter des accessits.

Anneke Beerten à Valloire en 2015.

Anneke Beerten à Valloire en 2015.

Anneke Berten échoue le plus souvent au pied du podium, avec une constance qui doit être lassante.

Anneke Berten échoue le plus souvent au pied du podium, avec une constance qui doit être lassante.

Sans besoin de Yalta, les place semblent tout autant prédeterminées pour la troisième et la quatrième place, la palme revenant à Anneke Beerten abonnée au pied du podium.

En 2014 et 2015, Anneke Beerten a terminé à la quatrième place pour plus de deux tiers des manches.

En 2014 et 2015, Anneke Beerten a terminé à la quatrième place pour plus de deux tiers des manches.

Il faudrait maintenant plonger dans les temps pour avoir une idée de l’écart qui peut exister entre les quatre premières du classement, je m’en occuperai ultérieurement. Mais il est clair à la lecture des ces stats que seule une blessure, un abandon sur casse mécanique semble en mesure de pouvoir bouleverser l’ordre établi.

Voici, fin juin après trois manches donc, les écarts de points entre les premiers du général, Tracy Moseley et Justin Leov et leur challengers. Preuve par l’image, finalement, que le championnat homme est bien plus ouvert. Il y a déjà presque l’équivalent du nombre de points que donne la victoire dans une manche entre Isabeau Courdurier et Tracy Moseley, tandis que Richie Rude, au même niveau chez les hommes, n’est qu’à une demi-manche, 250 points, de Justin Leov.

Si l'écart est plus serré chez les filles entre la deuxième et la première place, pour le reste des accessits la situation est plus ouverte chez les hommes.

Si l’écart est plus serré chez les filles entre la deuxième et la première place, pour le reste des accessits la situation est plus ouverte chez les hommes.

Et derrière me direz-vous, pour les accessits des accessits ? Et bien, ça pousse, il y a les jeunes françaises notamment, mais nous regardons ça un peu plus tard !

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Le retour des grands espaces

C’était l’été, une idée bête soumise par Marc quelques jours auparavant, une tentative de jardinage grand style réalisée par Miguel et Oscar voici quelques semaines, c’était donc trop beau. Après un hiver passé à rouler en plaine, ou dans les piémonts, à l’exception notable de quelques sorties neigeuses ou enneigées, l’envie d’aller en découdre avec les hauteurs se fait drôlement pressante. Souvenez-vous, j’en ai déjà parlé dans cette colonne, l’esprit de Blanquette, Monsieur Seguin tout ça. Donc c’était le symptôme, il fallait évacuer le syndrome.

10 % de moyenne, un tronçon de 800 mètres à 17 % de moyenne, heureusement que nous étions à l'ombre !

10 % de moyenne, un tronçon de 800 mètres à 17 % de moyenne, heureusement que nous étions à l’ombre !

Au lever du rider, chargé des verres de la veille au soir, la bouche était pâteuse et pas fraîche. 7 heures, C15, vélos rangés, nous avons pris la route de Prades puis Casteil, le col de jou, la piste vers le refuge de Mariailles pour nous garer finalement au Randé. De là, on ne rigolait déjà plus. En moins d’un kilomètre, nous nous sommes gentiment fait déposer par une traileuse sur la piste. C’est dire la vitesse canonique à laquelle nous avancions ! À notre décharge, en plus de la charge de la veille, il faut avouer que cette piste n’est pas une partie de plaisir. Ça monte tout le temps, bon, ça c’est plutôt logique, mais ça monte DUR tout le temps, ça c’est moins courant. En gros, nous avons roulé en moyenne sur 10 % pendant 6 kilomètres. Une paille.

J'en ai bien bavé pour arriver là.

J’en ai bien bavé pour arriver là.

Ce n’est pas la bouche qui pédale, mais quand elle est pâteuse, bizarrement, on pédale généralement moins bien. Allez comprendre. J’ai souffert dans la montée, cherché à oublier la pente, usé de ruses diverses, jusqu’aux plus improbables, chanter à voix haute en même temps que je pédalais. Bref, je me consolais avec les paysages qui s’ouvraient sous nos yeux à chaque trouée dans les arbres ou chaque virage dans la pente. Cela me faisait penser au Val Maira, en Italie, où je suis allé rouler l’an passé pour O2 Bikers.

La trace était soft, les protections d'Amygos au repos au Col.

La trace était soft, les protections d’Amygos au repos au Col.

Au col, la Collade de la Rqouette, au bout de cette bavante il faisait bon, un groupe de randonneurs espagnols prenait sa pause avant de continuer à monter vers le refuge de Pla Guillem quand nous nous attaquions tranquillement la descente. C’est doux, les premiers mètres sont tranquilles dans l’herbe, au milieu d’une végétation pas très haute mais point trop agressive en dépit de sa propension à manger le chemin. C’est drôlement agréable en tout cas et sans difficultés.

Fini de jouer, maintenant on descend.

Fini de jouer, maintenant on descend.

La trace devient joueuse quand ont quitte la crête pour plonger dans la pente. Les épingles se multiplient mais passent toutes très bien, la terre est souple, parfosi la végétation vient masquer la trace mais sans la fermer, quelques arbres par contre son bien installés en travers. Mais c’est tout bon. On coupe la piste, et c’est reparti, droite gauche, on rate parfois l’épingle, on revient sur la trace, pour finir part débouler dans une minuscule clairière où trône, seul, un orri, une casemate de pierre sèche de toute beauté intérieure.

Le doux bruit du single d'été.

Le doux bruit du single d’été.

L'esprit de la trace à peine marquée dans l'herbe neuve du printemps.

L’esprit de la trace à peine marquée dans l’herbe neuve du printemps.

Il faut entrer par la porte pour prendre la mesure de la justesse de la construction de la coupole. Comme une basilique rustique… Descendu ensuite jusqu’au parking, Marc me laissait filer pour voir ce qu’il ya avait derrière, il connaissait déjà, pendant qu’il descendait la voiture. Le chemin, GR10, qui descend vers le col de Jou n’est pas bien roulant, sauf à pouvoir mettre en œuvre une technique de franchissement d’épingles particulièrement éprouvée et une certaine effronterie face au vide et aux regard narquois des pierres attentives en quête d’un bon steak.

Jolie casemate dans la descente.

Jolie casemate dans la descente.

Mais certains passages méritent de l’emprunter quand même, pour le côté joueur de l’affaire. Ensuite, au col de Jou, inutile de continuer vers Casteil, il est probablement beaucoup plus intéressant de suivre le GR10 jusqu’à Py.

Au loin le Madres, préoccupation de notre prochaine sortie.

Au loin le Madres, préoccupation de notre prochaine sortie.

Ce qui ferait, depuis Pla Guillem, une bien belle descente de 1400 négatif. Qui vient ?

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Faut pas s’en fer

Une route créée de toutes pièces, un puzzle d’histoire, d’histoires, autour desquelles il ne fallait pas s’en faire. Nous avions le fer comme filigrane de la journée. De fer, il fallait un moral ce dimanche pour lutter contre la chaleur. Boire beaucoup et préserver son organisme pour toucher au but.

C'est ce qu'on appelle le "petit matin", clin d'œil du Canigou.

C’est ce qu’on appelle le « petit matin », clin d’œil du Canigou.

Rendez-vous était pris de bonne heure, vers 6 h 30 à Finestret pour organiser les navettes et aller toucher le point haut de la sortie du jour. Un gros morceau en forme de voyage dans l’histoire. Nous allions donc dévaler la vallée de la Lentilla en passant par quelques uns des sites autrefois exploités pour leur fer et parachever, valider, une trace élaborée tout au long des explorations et nettoyages de l’hiver, un enchaînement de singles inédits.

Premières crevaisons, mais aussi les dernières jusqu'au parking de l'arrivée.

Premières crevaisons, mais aussi les dernières jusqu’au parking de l’arrivée.

Le départ fut donné vers 7 h 30 avec déjà du retard par rapport à ce que nous avions prévu. Avec toujours en entame ce caviar de Palomère, sentier posé royal dans la pente au départ du col qui dégringole en deux temps vers le fond de la vallée de la Lentilla. Las, une crevaison au départ, puis une autre un peu plus bas nous grignotèrent encore des minutes précieuses. Mais la facture nous serait tendue plus tard.

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Au pied de cette descente [note pour plus tard, les genêts sont envahissants sur certaines portions, et les orties vigoureuses, il faudra nettoyer pour l’année prochaine], nous entrions dans l’inconnu, ou presque. Il y avait d’abord ce portage un peu brutal sur ce vieux chemin que nous avons nettoyé ces dernières semaines, un portage suffisamment raide pour mettre à mal le moral des moins habitués à ce genre d’exercice ingrat. Puis un bout de piste, ombra y sol, pour rejoindre le sommet du single suivant.

On a connu des portages plus difficiles, mais celui ci est entièrement à l'ombre .

On a connu des portages plus difficiles, mais celui ci est entièrement à l’ombre .

Avec au milieu de ce gros morceau qui nous fit reprendre tout le dénivelé perdu dans la première descente, le passage par la mine de fer dont les vestiges jonchent encore les abords.

Ombra y sol après le portage.

Ombra y sol après le portage.

Une fois engagé dans le deuxième single de la journée, j’étais obligé d’admettre que l’endroit n’était pas aussi cool que lorsque nous l’avions roulé voici quelques semaines. Le printemps a fait son œuvre et la végétation bien poussé [note pour plus tard, là aussi il faudra aller nettoyer la partie haute].

Parfois la trace se perd dans les genêts.

Parfois la trace se perd dans les genêts.

Par endroit, la trace se perd dans les fougères, disparaît sous les genêts. De quoi se mettre des boîtes comme il faut, une pour moi, et de jeter Vincent à terre sur de méchants cailloux. Bilan, l’avant-bras largement et profondément ouvert, il a dû rallier le bas de la descente à pied avant de partir avec Gaël retrouver la voiture puis gagner les urgences de Prades.

En piochant dans les pharmacies des uns et des autres nous avons pu panser Vincent mais la plaie était bien trop profonde pour continuer. :(

En piochant dans les pharmacies des uns et des autres nous avons pu panser Vincent mais la plaie était bien trop profonde pour continuer. 🙁

Au moment de la chute il était à 50 mètres de la fin du chantier. Là, après le portillon, où le sentier entre dans la forêt, se fait propre, joueur, cherche à nous épingler dans ses courbes pour nous conduire à toute vitesse jusqu’à la Lentilla. Et son surplomb splendide, un sentier très rapide, très doux au départ dans les feuilles, une cerise sur ce gâteau déjà bien sympa.

Dommage ce n'était pas cuit.

Dommage ce n’était pas cuit.

À la route, il fut décidé d’aller faire de l’eau à Baillestavy, les heures qui nous restaient à rouler s’effectuant loin de toute civilisation, c’était plus prudent. deux cochons grillaient paisiblement devant le robinet avec les effluves délicieuses propres à ouvrir l’appétit. Mais il n’était pas question de se taper l’incruste au repas, les carcasses n’étaient pas cuites de toute façon, et nous reprîmes le chemin de notre aventure pour monter par la piste vers le hameau perdu de la Coume. Et nous engager sur ce sentier brutal et trialisant déjà parcouru à deux reprises ces dernières semaines. La connaissance de la trace aide grandement sur ce type de single difficile qui serait largement plus aisé à abordé en plus s’il y avait un peu plus de visibilité [notre pour plus tard, encore un truc à nettoyer] et s’il était débarrassé dans certaines portions des monceaux de pierres pourries qui jonchent la trace.

joli passage en balcon un poil exposé de cette trace sauvage.

joli passage en balcon un poil exposé de cette trace sauvage.

Alors que j’avais quasi tout passé mercredi soir précédent, là, je me suis collé trois boîtes, allez comprendre. Au point d’oublier de conduire tout le monde jusqu’au village en ruine, juste au dessus de la trace pour profiter du point de vue sur la vallée. En bas, on se dit que malgré la difficulté c’est quand même bien bon, et qu’une fois nettoyé… Là, Geoffrey, écoeuré par l’ascension précédente et face au gros morceau qui restait à gravir, 5 kilomètres de single en plein cagnard, pris la décision sage de rentrer par la route. Notre groupe ne cessait de se réduire, de fondre comme peau de chagin, où comme du gras au soleil. Un petit bout de single légèrement descendant le long de la Lentilla et nous fîmes une courte pause pour manger un peu à l’ombre. Juste avant d’attaquer la remontée du GR36 jusqu’au pic Marbet.

La misère sur le GR36 pour atteindre le pic Marbet.

La misère sur le GR36 pour atteindre le pic Marbet.

Et d’être proprement rincés par la chaleur venant par bouffée comme si elle voulait nous asphyxier à chaque fois que nous sortions du couvert des arbres. Comme si, sensation oppressante s’il en est, comme si, à la touffeur ambiante s’ajoutait le rayonnement des pierres gorgées de chaleur, comme si nous étions pris en sandwich entre la chaleur directe du soleil sur la peau, le rayonnement du sol et l’ambiance, les odeurs de sécheresse, de feuilles qui crissent. Nous étions un peu trop tard dans la matinée pour vraiment profiter de cette grimpette transformée en épreuve pas banale. Au col, il fallait en finir, nous avons laissé de côté le dernier bout d’ascension prévu pour revenir dans la vallée du Llech, il commençait en plus de se faire tard et nous étions attendus pour le déjeuner au Camping du Canigou, par Bernadette qui avait préparé le repas et Vincent et Gaël revenus des urgences qui patientaient devant une bière fraîche.

Bon app'

Bon app’

Comme des morts de faim, nous nous sommes donc engagés dans cette descente pour la trouver défoncée, un véritable chantier pour achever les bras et les cuisses. Moulus en bas, nous avons tricoté dans un chemin de chèvres, ou de moutons pour aller chercher le dernier bout de single de la tournée et débouler direct au pied de la tireuse à bière. Échaudés mais ne craignant pas l’eau froide !

À refaire après nettoyage.

À refaire après nettoyage.

Au final ça fait un joli profil sur 25 km et 1000 mètres de dénivelé positif pour 1700 de négatif et 4 h 30 de déplacement. Avec une météo plus clémente, un peu moins de temps perdu, on peut aisément rajouter de 150 à 600 mètres de d+ et d- si envie sur la dernière bosse. D’autres photos en cliquant ici !