Putain de bordel de merde

Il y a des jours ainsi lors desquels tu pars en te disant que ça valait le coup d’attendre. Puis en fait, c’est la débandade. L’attente n’est pas récompensée, l’affaire tourne à la farce. Ce samedi fut de cette aune funeste, un samedi de merde. Le programme était alléchant, la jonction de deux belles traces de vélo de montagne avec au milieu un truc que je connaissais pas. 40 bornes tracées à l’arrache, autour de 1200 m de positif et plus de 2000 à perdre.

Chat et souris.

Chat et souris.

Il avait plu la veille au soir, la poussière allait être collée et on pouvait espérer avoir un grip de fou dans les parties les plus pentues. Déjà en arrivant, les nuages, oracles d’eau vaporisée, nous prévenaient qu’ils ne nous lâcheraient pas de sitôt. Ils s’engouffraient dans les vallées avec la gourmandise de ceux qui ont la dalle après trois semaines d’absence pour rebondir dans les combes et rigoler de notre insouciance bravache.

Souris et chats

Souris et chats

Nous avons englouti le dénivelé initial comme sans trop nous en rendre compte, la piste était belle pour nous mener à plus de 2200 mètres, là où le regard se perd à chercher l’horizon. Mais les nuages cannibales de rêves de fortunes nous avaient bouffé l’horizon, où plutôt nous l’avaient rendu malheureusement palpable, l’avaient amené au bout de nos doigts.

Toucher l'horizon du bout du doigt.

Toucher l’horizon du bout du doigt.

À la collade de Roques Blanques, nous avons causé saucisson et chimie dans la purée de pois dont seule la densité variait de loin en loin, comme une mélodie de Fauré, c’était donc affaire de cuisine. L’idée était de trouver un passage un peu plus roulant que le sentier balisé pour traverser les Esquerdes, une crête parsemée de triangles de pierres. Ça semble passer sur Google earth, mais dans la réalité, quand tu n’y vois pas à 50 mètres, c’est difficile de se faire une idée de la direction à prendre et à suivre.

Casse-croûte saucissonesque.

Casse-croûte saucissonesque.

Vaillants nous partîmes quand même par le flanc est de la crête en nous disant que l’aventure allait nous sourire. Elle a presque sourit, jusqu’à un une série de plats parsemés de pierres concaves nous obligeant à de convexes trajectoires. Ça chauffe les cuisses velu par endroit quand la pente se fait un peu raide, mais nous étions toujours plongés dans le brouillard pas franc des nuages, jusqu’à ce banc de chevaux au milieu de la nuée réchauffé par un rayon de soleil. Pour la suite, il nous fallait choisir. Revenus sur le flanc ouest de la crête, un large pierrier barrait l’horizon de nos roues.

Tu murmures à l'oreille ?

Tu murmures à l’oreille ?

Drôle d'ambiance à 2300 m.

Drôle d’ambiance à 2300 m.

Nous décidions donc de tracer en free ride dans la pente pour retrouver le sentier et finalement nous trouver au pied du mauvais passage que je cherchais à éviter. Il faudra retourner voir, je suis certain que ça passe de l’autre côté. Un bon moment de portage plus tard, nous entamions sur la selle la fin de la traversée des Esquerdes pour rejoindre la mort de l’Escoula, au prix d’un nouveau portage un peu raide juste sous la falaise. C’est là qu’il faut sortir les watts du sac pour rester sur le vélo le plus longtemps possible, savoir sortir de la trace des marcheurs à la poussière fine pour aller s’épuiser dans l’herbe rase, terrain de jeu des isards qui galopaient au loin un peu plus bas par dizaines sous les sifflements prudents de marmottes.

Sorti de nulle part.

Sorti de nulle part.

Et là, la cata. Campé sur le vélo, arc-bouté sur les cuisses pour rouler encore quelques mètres et passer ces putains de pierres, j’ai senti mon cul se dérober, sans comprendre, une glissade, la stupéfaction a duré une seconde, le temps que je réalise, la selle ne tenait plus sur sa tige. Les deux vis du chariot avait cassé net en même temps. J’étais dégouté. Pour de vrai.

Pas suffisant.

Pas suffisant.

Nous avons bien tenté de remettre la selle en place pour que je puisse rouler encore un peu, au moins pour protéger mon fondement des velléités pénétratrices de la tige de selle ainsi dégarnie, sans succès. Le beau rafistolage n’a pas tenu trois minutes. Et c’est là que l’expression « se retrouver au milieu du gué prend tout son sens ».

Dernier portage.

Dernier portage.

J’ai donc fait une dizaine de bornes sans selles et sans plaisir, alternant marche et ride, posant le pied dans le cassant qu’habituellement je franchis, écourté la sortie de moitié… Aujourd’hui j’ai les cuisses mâchées, les mollets endoloris et le moral en petites pièces. Fuck.

Je retournerai, encore, pour trouver le passage.

Je retournerai, encore, pour trouver le passage.

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