À bien y regarder, je le disais l’autre jour, je ne suis pas cycliste. Enfin pas tant que cela. Il y a quelques jours j’ai eu la chance d’accueillir Carlos, King of Azores, à la maison. C’est lui qui avait organisé notre voyage de janvier avec Damien sur son île, Sao Miguel (vous vous souvenez le joli reportage là). Et finalement, d’avoir roulé avec lui ces quelques jours m’a rappelé combien il était important de partager. Une trace, un tracé, un boucle qu’on a mis des jours à échafauder, reconnaître, travailler, ne vaut que si le plaisir qu’on y trouve est partagé.
Rouler ensemble, se gorger des paysages, des bons moments, partager les emmerdes aussi, la mécanique qui souvent résiste moins à trois ou quatre que face à un type tout seul. Bavarder quand c’est possible à la montée. Rigoler et crier dans les descentes, pour partager le plaisir qu’on a eu à franchir un passage un peu compliqué, ou à réaliser un enchaînement sympa. Savoir aussi poser son cul dans la mousse, sur un caillou ou dans la poussière pour bavarder encore, se reposer, se raconter des histoires des anecdotes, donner envie d’aller rouler ailleurs, savoir aussi sortir du simple monde-univers du vélo.
J’ai conduit Carlos sur quelques traces que j’affectionne particulièrement, certaines depuis longtemps, d’autres découvertes depuis peu de temps, mais qui me semblait correspondre à ce qu’il avait envie de rouler, c’était la première fois qu’il quittait les Açores avec son bike. Et, ennuis mécaniques exceptés, nous avons passé de bon moment sur les sentiers des Pyrénées-Orientales. L’autre jour avec Damien, Simon, Jake et Carlos en route pour la descente du train jaune, nous avons causé largeur de cintre, vélo, mais aussi champignons et mis sur pied un concours de prononciation franco-anglaise… Avec mes habituels camarades de roulage, Marc et Giorgio et Franck pour les plus réguliers, mais aussi les autres, nous parlons également d’autres choses, qui n’ont rien à voir avec le vélo, le boulot, les gosses, l’actualité… Parfois c’est aussi prendre le temps de s‘arrêter sur une difficulté technique et de s’entre-aider pour parvenir à la franchir. C’est aussi partager de l’eau ou des noix et des raisins sec quand l’un de nous a un coup de mou. C’est aussi savoir lever le pied dans la montée pour accompagner celui qui ce jour là à le plus de mal.
Hier avec Jake, ce fut une autre chanson. Après avoir roulé un brin sous la chaleur, nous avons parlé de Barthes et De Saussure sous un arbre pour nous protéger du soleil. Il faut également question de l’histoire de France, de la fascination des Anglais pour Napoléon, du complexe œdipien du peuple américain… Nous discutions aussi en roulant, nous taisant quand la pente devenait favorable. Alors, j’entendais juste les rires de Jake derrière moi quand il se régalait, comme si j’avais le Joker aux trousses. Un motif de plus de rigoler une fois en bas et d’aller boire une mousse pour continuer de bavarder, jusqu’à la prochaine fois.
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